1407, 25 juillet.
Louis, duc de Bourbonnais etc., réglemente l'administration des eaux et forêts en Beaujolais en spécifiant les prérogatives du maître des eaux et forêts, des forestiers et leur action pour lutter contre les abus et pour la préservation des espaces forestiers du domaine.
A. Original perdu.
a. Mémoires de Louvet. Histoire du Beaujolais, II, p. 316-322 (éd. quelque peu modernisée que nous reprenons à défaut de l'original ou d'une copie, sauf pour la ponctuation, les accentuations et la graphie de certains mots que nous rétablissons selon la graphie de l'époque telle qu'elle apparaît dans les autres actes de Louis II, comme, par exemple, "maistre" à la place de "maitre", "estat" à la place d'"état", "esmoluments" à la place d'"émolument", etc.).
Indiqué : Mémoires pour servir à l'histoire de Dombes..., par Louis Aubret..., II, p. 441.
Loÿs, duc de Bourbonnois, comte de Forez, baron et seigneur de Beaujeu, pair et chambrier de France, a tous ceux qui ces presentes lettres verront, salut. Sçavoir faisons que pour obvier aux grands abus et entreprises qui, ou temps passé, ont esté faits et procurés au fait de nos fourests et eaux de Beaujolois par les maistres, gardes, fourestiers et autres desdites eaux et fourestz qui ont induement poigé, preins et levé trop excessives sommes de deniers sur les […] et plusieurs autres droits et esmoluments non deux sur lesdites fourestz et eaux au prejudice de nous et des fermiers et acenseurs d'icelles eaux et fourestz, comme par plusieurs personnes qui en icelles ont follement usurpé et mesfait ou autrement y ont porté tres grant dommaige non d'autant corretions ny pugnitions de nous ne de justice, nous avons levés, tenues et avisees et fait aviser par nostre grand conseil appelé pour ce par devant nous certaines ordonnances qui ja pieça avoient esté faits par nous et par nostredit conseil et icelle par deliberation de notre conseil en aucuns de leurs articles et puis a nous amendees et en estat deu et convenable redigés en la forme et maniere qui s'ensuit : Et premierement le maistre des fourests, de deux en deux mois, visitera lesdites fourests, par luy ou son lieutenant, et, en les visitant, tiendra son siege es lieux accoutumés d'ancienneté, a ses depens. Item, tous ormaux versié, rompus et bois abattus de coignee, quand ils sont trouvés par le maistre des fourests ou son lieutenant en visitant les fourests ou par les fourestiers, seront mis par escrit par qualité, quantité et declaration de lieu et mis en vente par crié et attrousse aux plus offrans es assises dudit maistre des fourests. Item ledit maistre des fourests aura son papier ordinaire ouquel seront escript par la main du cler de sa cour qui aura serment a nous tous les procés et exploits qui fait seront oudit office. Item menus bois a chauffage seront vendus es assises et par la main dudit maistre des fourests ou son lieutenant ou plus offrant comme dit est, et tout mis et enregistrés oudit papier ordinaire et avant l'estrousse sera vu et visité par ledit maistre des fourests ou son lieutenant. Item les fourestiers raporteront leurs prises par serment, sans fraudes, auxdites assises par escrit sous leurs seaux, et se ils sont trouvés en coulpe ou en fraude, ils seront privés de leurs offices et pugnis de leurs biens en amande arbitraire envers nous, laquelle amande chaira en la tauxation de notre conseil. Item les fourestiers auront copie des privileges des usages de leurs gardes et pour expres se prendront garde lesdits fourestiers comme lesdits usagers useront de leurs droits et, se ils sont trouvés abusant contre la teneur de leur privilege, le fourestier fera la prise et raportera en la chambre de nos comptes a Villefranche et en faira partie pour nous, et cependant chaira la main dudit usage, et dudit abus cognoitra ladite chambre, et ne seront tenus prendre bois desdits usages se n'est par la main dudit maistre des fourests, et aussy ne mettant ausdites fourests bestes en plus grand nombre qu'ils ne doivent. Item si les fourestiers entour leurs gardes trouvent nouveaux edifices de maison ou autre ouvrage a un aisseu, doelle, planchier, roües et chavancé ou autre ouvrage de bois, ilz le pourront prendre ou arreter et raporter la prise es assises dudit maistre des fourests, lequel sçaura et enquerra de quel bois et fourest est venu ledit ouvrage ou d'ou l'auront eu ceux sus qui y aura esté trouvee, et qui ne poura montrer son titre raisonnable, ledit maistre des fourests le pourra condamner a emande selon le cas. Item toute personne qui sera trouvee en forfait de bois prandre et ambler en nos fourests payera pour un plançon soixante sous pour estime, vingt cinq sols pour une chavance de bois mort en bois menu a eschaufage dix sols, car c'est coutume ancienne, et par-dessus payera l'emande et autre punition selon le cas et la faculté. Item toute personne qui sera trouvee par nuit forfaisant esdites fourests, il perdra ses bœufs, chavance et ferremens pour le delit, lesquels bœufs seront par ce a nous, et la chavance et ferremens seront au fourestier pour leur peine et diligence. Item qui trouvera homme par nuit abatant bois ausdites fourests a la coignee, il payera soixante sols a cause de la nuit, et en outre payera l'amende de forfait selon le bois qu'il abatra, ainsy comme si fait et abatut l'avoit par jour, ou sera le cas criminel ou arbitraire a nous, et se il l'abat a la sie, il sera punis criminellement car le delit de la sie est plus grand que de la coignee, parce que la coignee appelle le fourestier. Item se le fourestier trouve bestes a garde faite en nos taillis et revenues, chacune beste et son segant, se il y est, payera sept sols, et se il n'y a garde faite, chacune beste payera douze deniers et pour chacune fois que trouvé y seront. Item les hommes de nos vavasseurs ne autre, hors que les nostres sans moyens, n'ont point de pasturage en nos bois et, se trouvés y sont, en quelque saison que ce soit, ils payeront pour chacune beste l'amande comme dessus. Item de demi en demy ans, ledit maistre des fourests tauxara ses exploits et les baillera a lever aux fourestier du lieu, et les sommes desdits exploits avec tout autre esmolument des fourests par parties et par ecrit sous son scel raportera a notre tresorier de Beaujolois, lequel sera chargié d'en compter en recepte et en depense. Item les fourestiers ne pourront vendre bois ne avoir connaissance de cause fors qu'en prendre, arrester, adjourner et raporter audit maistre des fourests, et seront crus de leurs prises par serment en la maniere acoustumee. Item se adcenseront et vendront les bois paissons es chastellenies ou mandement ou elles sont assises. Item si les paissonniers ou leurs deputés durant leur temps trouvent pourceaux ou bestes en leurs paissons ou en leur paisson apanage, chacune beste avec son segant et chacun porc payera douze deniers, dont a nous les deux parts et ou marchant le tiers pour chacune fois que trouvees y seront. Item a esté ordonné que des restes des grosses ventes de vingt franc en sous, le maistre des fourests pour scel et ecriture aura cinq sous, si elle excede trente francs, sept sous six deniers, de quarante franc, dix sols, et pour la plus grande vente, vingt sous. Item semblablement de la vente des menus bois revenans. Item les restes des paissons sont tauxés comme de ventes. Item des ormaux versier, mort bois ou bois par terre, neant si le prix n'excedde dix francs, en celuy cas dix sols pour lettre. Item tous depens seront nuls sur les acheteurscet ne seront tenus de ne rien payer, fors tant seulement ledit restas le prix a quoy elle sera mise et les quittances du thresorier, dont t'en payera audit tresorier, pour chacune quittance particuliere, quatre blancs seulement, et pour chacune quittance generale cinq sols tournois, par mise, que de vingt livres et au-dessous, l'on ne payera rien de quittance générale. Item, pour les ventes criees par trois mois en toutes les chastellenies esquels lieux les ventes seront aussi au jour des foires et marchiés. Item, le maistre des fourests et le clerc, ne chatelin, ne fourestier n'auront nul droit de cire d'abeilles trouvees deespaves es fourests ne es bois abatus, mais seront recueillis par nous gens a notre profit et en comptera le tresorier. Item les fourestiers seront tenus, a chacune fois qu'ils trouveront les bestes es taillis, de les mener a justice en lieux hors du bois, afin de sçavoir a qui elles sont, pour en raporter plus seurement, et, au cas qu'ils ne les pouront pouter hors du bois, ils fairont crier deux ou trois fois se ils y viendra nuls de coté, pour mieux prouver leur prise. Item, de mettre es ordonnances ceux qui abatront le bois a la sie, pour en faire pugnition corporelle de oster membres, selon les instructions royaux. Item que le marchand des ventes est tenu de garder le bois de sa vente d'entour et d'autant comme l'on peut oïre le cop de la cognié. Item, soit memoire au fourestier de bien garder les revenus des taillis, a peine de nous rendre le domaige. Item, chacun fourestier est tenu d'aller deux fois le jour en sa fourest, le soir et le matin, et de raporter de quinze en quinze jours ses prises. Item, que l'on baille a nostre tresorier de Beaujeuloi deux fois l'an les nouvelles ventes et exploits, c'est a sçavoir quinze jours avant Noel et quinze jours avant la Saint Jean Baptiste. Item que les petites garennes soient baillees a cens et aussy les petits etangs. Item ne se pouront vendre taillis, bois versé ne abatus de nuit des grosses ventes ne autrement sous le sein du martel ou l'aveu de la garde de celuy et qui le fera autrement il le mandera judiciallement. Item quand il faudra faire grosses ventes en haute forests, la iront pour faire les susdites ventes le maistre des fourest, la garde du martel et l'arpenteur sereviente ou le tresorier avec les deux d'iceux pour voir et aviser le lieu plus profitable pour nous et le feront layer par ledit arpenteur tel quantité que bon leur semblera a vendre et la mettront a rancherie, et seront vendus des layes d'icelle vente le plus profitablement pour nous et sera baillé au martel au marchand d'icelle, pour faire l'etrousse pour signer son bois s'il requiert. Item que les ventes soient coupé prés de la terre pour les revenus, laquelle sera gardé pour le temps deus et accoutumé. Item que nous ne donrons nuls bois de nos fourests ; mais, si nous voulons donner a aucuns pour bastir, nous leur donnerons de l'argent pour acheter des marchands et se payera par la main du tresorier, et ainsy ne seront pas foulé les marchands ne les fourestiers et selon le terme des vantes. Item que tout bois qui sera necessaire pour nos bastimens et ouvrages sera avisé par le charpentier et maistre de nosdits ouvrages et sera délivré par le maistre des fourests et par la garde du martel. Item semblablement seront gouvernés les estangs, eaux, moulinset garennes et seront remis, sustenus en estat et apoissonnés par le conseil de la chambre de nosdits comptes, des profits qui en y seront et aussy des mises qui y seront necessaires, compteront les maistres des fourests et eaux le tresorier ou receveur, pour la certification dudit maistre des fourests, par le conterolle du maistre des fourests, et sera defendu par tout notre pays de Beaujeulois que, en quelque riviere que ce soit, il ne soit pascheurs si hardis de peschier, si ce nest des filets de droite maison dont le patron leur sera baillé par les gens de notre conseil, et sera tenu ledit maistre des fourests de aporter l'estat des apoissonneurs sous son scel une fois l'an et saing dudit clerc, et des garennes et moulins pareillement, afin que, si aucunes chose y fait faire, il y soit pourvu par l'ordonnance des gens de la chambre de nosdits comptes qui la fairont faire par le tresorier ou ceux qui il apartiendra. Item seront tenus les maistres et clers des fourests de jurer, garder et tenir lesdites ordonnances, sur peine de perdre leurs offices et d'emande arbitraire au cas qu'ils seront delinquans au contraire. Item que le clerc dudit maistre des fourests qui ecrira au papier des fourests sera tenu de nous faire serment, et eleus par l'ordonnance pour être conterollee ainsy qu'il apartiendra. Item que cestes ordonnances soient publiees en ladite chambre des comptes et par toutes les chastellenies de Beaujeulois, mises en un tableau pour en prendre copie qui voudra, afin que les delinquans soient pugnis. Item sembablement chacun ans, au lieux ou les choses seront baillees. Lesquelles ordonnances dessus transcrites et tous les points et articles d'ycelles nous avons agreables et icelles avons louees, aprouvees et confermees et par ces presentes, louons, agreons, aprouvons et confermons de notre certaine sience et pour l'avis de notredit grand conseil a meure deliberation, et voulons que icelles et tous les articles d'icelles soyent doresnavant tenus sans les enfraindre en quelque maniere que ce soit. Si donnons en mandement par ces presentes a nos amés et feaux gens de nos comptes, bailly de Beaujeulois et tous autres justiciers, officiers, presens et avenir, et a leurs lieutenans et a chacun d'eux si comme a luy apartiendra que les ordonnances cy dessus transcrites et tous les points et articles d'icelles tiennent et gardent et facent tenir et garder doresenavant, de point en point, selon leur forme et teneur, sans les enfraindre ne soufrir estre enfrainte, en aucune maniere, en punissant rigoureusement et sans deport les delinquans a ce contraire et par toutes voyes dues et raisonnables et en tel cas accoutumés et tellement et si rigoureusement les punissent que ce soit exemple a tous autres. Et afin que nul n'aye cause de les ignorer, vous gens de nos comptes faites les publier et signiffier en notredite chambre et ailleurs tantot sans delay a chacun an, par la maniere que dit est. En témoin de ce, nous avons fait mettre notre scel a ces presentes. Données le 25e jour de juillet, l'an 1407.
Par monseigneur le duc, a la relation de monseigneur de Norry1, monseigneur de Lespinace2, Gaugeta3 et plusieurs autres presens.
(Signé :) C. Denys.
1. Originaire du Nivernais, Pierre de Nourry est l'un des principaux conseillers de Louis II. Il est attesté comme conseiller du début de 1360 à 1410. Il occupe la charge de lieutenant général à plusieurs reprises à partir des années 1370 jusqu'à la fin du principat du duc en 1410 (A. Leguai, De la seigneurie à l'État. Le Bourbonnais pendant la guerre de Cent Ans, p. 283-291 ; O. Mattéoni, "Entre fidélité et compétence. Les conseillers du duc Louis II de Bourbon", p. 180 et 183 et suiv.). Il fait l'objet d'un jugement élogieux dans la Chronique du bon duc Louis de Bourbon par Cabaret d'Orville qui vante ses qualités de gestionnaire et de réformateur des finances ducales (Chronique du bon duc, p. 160-164, 275-280). Il était membre de la Cour amoureuse fondée en 1401 par Louis II et le duc de Bourgogne Philippe le Hardi (C. Bozzolo et H. Loyau, La cour amoureuse dite de Charles VI, I, n°201, p. 139).
2. Il s'agit de Philibert de l'Espinasse, dit Cormorant, seigneur de Changy. À cette date il est bailli de Beaujolais (première mention le 18 avril 1407) à 1409 (dernière mention le 28 mai). C'est lui qui prend possession du Beaujolais au nom de Louis II en 1400. Il reçoit à ce titre les châteaux de Montmerle, Chalamont, Lent, Thoissey (Mémoires pour servir à l'histoire de Dombes..., par Louis Aubret..., II, p. 432 et 465 ; Paris, Archives nationales, P 1368/1, n°1598). Il est châtelain de Chalamont dès 1401 (Mémoires pour servir à l'histoire de Dombes..., par Louis Aubret..., II, p. 405 et 406).
3. Il s'agit de Jean Gaget ou Gaiget, alias Gadet (cf. Moulins, Archives municipales, n°249, fol. 8). Il est notaire et bourgeois de Moulins. Comme secrétaire, il est très actif entre 1392 et 1408 (O. Mattéoni, "Écriture et pouvoir princier", p. 176). Il était aussi attaché à la Chambre des comptes de Bourbonnais. Évoquant les réformes de Pierre de Nourry, la Chronique du bon duc Louis de Bourbon précise que ce dernier retint "en la chambre des comptes ung qui avoit bonne mémoire appelé Gaiget, et qu'il eust ung clerc avec lui, et estoit cellui Gaiget un moult subtil homme, et bon coustumier" (Chronique du bon duc, p. 163). Il est conseiller à la Chambre de Moulins des années 1380 au début des années 1410. Comme d'autres conseillers moulinois, il fit souvent le voyage de Montbrison pour auditionner les comptes des prévôts foréziens (1394, 1397, 1399, 1404 : Archives départementales Loire, B 1917, fol. 22 ; B 1928, fol. 26 ; B 1929, fol. 12 ; B 1933, fol. 9v-10).
pour Gaiget.
Édition : Olivier Mattéoni .
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