1405 (n. st.), février. — Paris.
Louis, duc de Bourbonnais etc., accorde des lettres de rémission à Barthélemy Ogier, dit Villars, qui avait volé des jambons à l'abbé de Joux.
A. Original sur parchemin, avec l'initiale de Louis ornée, jadis scellé sur double queue. 425 x 485 mm, repli 45 mm. Paris, Archives nationales, P 1376/2, n°2720.
B. Copie insérée dans l'acte d'exécution de Pierre Fontachin, licencié en lois, lieutenant du bailli de Beaujolais1, en date du 7 avril 1405 (n. st.). Paris, Archives nationales, P 1376/2, n°2747.
Analyse : Titres de Bourbon, II, p. 150, n°4575.
Indiqué : O. Mattéoni, "Les ducs de Bourbon et la grâce", p. 135.
Loÿs, duc de Bourbonnois, conte de Fourez et seigneur de Beaujeu, per et chamberier de France. Savoir faisons a tous presens et avenir, nous avoir receu humble supplicacion des amis charnelz de Barthelemi Ogier dit Villars, povre laboureur, chargié de femme et de quatre petis enfans, de nostre ville de Chavanannes2 en Beaujeuloiz, contenant que comme ledit Villars fust tenu a l'abbé de Jo3 en XIIII bichés de froment a cause de certains gaignages qu'il tenoit de lui, et semblablement ledit abbé fust tenus en autres XIIII bichés de froment a certaines trois personnes ses creanciers, c'est assavoir a l'un en sept bichés, a l'autre en quatre bichés et a l'autre en trois bichés ; et jasoit ce que pour satisfaire a sesdiz trois creanciers, ledit abbé eust baillié en paiement a iceulx ledit Villars, et que icellui Villars, a la requeste dudit abbé, leur ont respondu et promis de paier pour et ou nom dudit abbé lesdiz XIIII bichés de froment. Neantmoins certain temps aprés, icellui abbé, pour ce qu'il ne trouva ou papier de ses debtes royé ne chancellé ledit debte dudit Villars, fist gaiger et pignorer4 ledit Villars, icellui estant hors de son hostel et dudit lieu, de deux pourceaulx qu'il avoit et le adjourner a certain jour en la presence de pluseurs illec presens, jasoit ce qu'il fust absent, pour veoir, vendre et livrer sesdiz pourceaulx, a laquelle journee ledit abbé, en l'absence dudit Villars, fit vendre, crier et subaster lesdiz pourceaulx et iceulx fit acheter par un de des gens, et aprés ce, les fit tuer, baconner et porter en son hostel. Et comme ledit Villars oÿ dire que icellui abbé avoit fait vendre iceulx pourceaulx, il fist adjourner ledit abbé par devant le juge dudit lieu a certaine journee, a laquelle icelles parties comparans, ledit abbé fist foy de sondit papier ouquel il monstra par escript commant ledit Villars lui devoit lesdiz XIIII bichés de froment. Et pour ce furent appellés, interrogués et oÿs sur ce lesdiz creanciers qui affermerent estre vray que ledit de Villars leur avoit respondu pour et ou nom et a la requeste dudit abbé desdiz XIIII bichés de froment, et ainsi se departirent. Et aprés ce, ledit Villars, soy veant ainsi mal traictié et trevaillié sans cause, esmeus des parolles de sadicte femme qui ledit fait lui mettoit tous jours avant, s'en alla celle nuit en l'abbaye dudit lieu de Jo vers l'abbitacion dudit abbé, et par une fenestre entra en la chambre ou estoient lesdiz pourceaulx baconnez et pendus, et prist l'un desdiz pourceaulx ou bacons avec un coissin qu'il mist sur son col et l'emporta en son hostel. Et lendemain au matin, pour ce qu'il vit deux ou trois sergens qui venoient vers lui, doubtant rigueur de justice, s'enfouy et absenta de nostredit païs de Beaujoloiz, delaissiés sadicte femme et sesdiz enfans en grant povreté et meschief de ce et de tous ses biens que ont esté prins et mis en nostre main, et n'oseroit ledit Villars jamais retourner en nostredit païs, se par nous ne lui estoit nostre grace impartie sur ce, si comme dient lesdiz supplians en nous requerant humblement que, comme ledit Villars ait tous jours esté homme de bonne fame et renommee sans ce que oncques mais il ait esté attaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reproche, eue compassion a sadicte femme et enfans, il nous pleust nostredicte grace lui eslargir sur ce. Pour quoy nous, ces choses considerees, voulans misericorde preferer a rigueur de justice, a icellui Barthelemi Ogier dit Villars, de nostre certaine science et grace especial et de nostre auctorité et puissance, avons quicté, remis et pardonné et par ces presentes quictons, remectons et pardonnons le cas, crisme, fait, larrecin et delit dessus diz avecques toute amende, peine et offense corporelle et criminelle en quoy il pourroit estre encouru envers nous et justice pour occasion de ce, l'amende civile a nous reservee, a la tauxacion de cellui ou ceulx de noz juges a qui il appartendra. Et neantmoins cassons, revocquons et anullons tous bans, appeaulx, proclamacions et procés fais et encommenciés a fere contre lui en le restituant et remectant a sa bonne fame, rennomee ou païs et ailleurs et a ses biens non confisqués, en imposant silence perpetuel sur ce a nostre procureur present et avenir, satisfacion ou restitucion faicte a partie civilement tant seulement. Si donnons en mandement par ces presentes a noz bailli et juge de Beaujeuloiz et a tous noz autres justiciers et officiers presens et avenir ou a leurs lieuxtenans et a chascun d'eulx si comme a lui appartendra que ledit Villars de nostre presente grace, remission et pardonnance facent, laissent et sueffrent joïr et user plainement, paisiblement et perpetuelment, sans le molester ou empescher ne souffrir estre molesté ou empeschié orez ne pour le temps avenir, en corps ne en biens en aucune maniere au contraire, mais se sesdiz corps et biens ou aucuns d'iceulx estoient pour occasion de ce prins, saisis, arrestés ou empeschiés, se les lui mectent ou facent mectre tantost et sans delay a plaine delivrance. Et afin que ce soit ferme chose et estable a tous jours mais, nous avons fait mectre nostre seel a ces presentes, sauf nostre droit en autres choses et l'autruy en toutes. Donné a Paris, ou moys de fevrier, l'an de grace mil quatre cens et quatre.
(Repli:) Par monseigneur le duc, monseigneur l'abbé de Moustierarramé5, l'Ermite de la Faye6 et autre presens
(Signé :) De Bar.
1. Pierre Fontachin a été juge de Beaujolais une première fois de 1391 à 1396. Remplacé par Étienne de La Grange, il est de nouveau nommé en 1402, et est attesté jusqu'en 1411, date à laquelle on trouve un autre juge : F. Maillard, "Les gardes du sceau du bailliage de Mâcon, de la chancellerie de Beaujolais et du bailliage d'Auvergne", p. 168 et 169 ; Paris, Archives nationales, P 1366/2, n°1512 ; P 1361/1, n°911 ; P 488/1, n°474.
2. Chavanne : Rhône, ar. Villefranche-sur-Saône, c. Beaujeu, com. Quincié-en-Beaujolais.
3. Joux : Rhône, ar. Villefranche-sur-Saône, c. Tarare.
4. Dans le sens "saisir comme gage".
5. Il s'agit de Jean de Vervins, abbé de Montiéramey (Aube, ar. Aube, c. Lusigny), un des principaux conseillers de Louis II dans les années 1402-1405 (O. Mattéoni, "Entre fidélité et compétence. Les conseillers du duc Louis II de Bourbon", p. 186). Il sert aussi le roi comme conseiller à la Cour des aides de 1404 à 1416, sauf en 1411-1412 (G. Dupont-Ferrier, Le personnel de la Cour ou Chambre des aides de Paris, p. 181). De 1404 à 1416, il préside plusieurs audiences comme Premier général (Id., "Le personnel de la Cour ou Chambre des aides de Paris", n°26, p. 38).
6. Il s'agit de Guillaume de Montrevel. Son nom lui vient de son mariage avec Marguerite l'Hermite de La Faye, dont les possessions s'étendaient en Bourbonnais et en Auvergne. Proche de Louis II de Bourbon, ce dernier le désigne comme l'un de ses exécuteurs testamentaires en janvier 1409 (Paris, Archives nationales, P 1370/1, n°1878 ; Chronique du bon duc, p. 314). Il est aussi conseiller et chambellan de Charles VI, membre de la cour amoureuse. Il combat à la bataille de Roosebeke. Lieutenant de la sénéchaussée de Beaucaire en 1389-1390, il y exerce comme sénéchal en 1403-1407, 1410-1412 et 1412-1413. Christine de Pizan le mentionne dans son Débat des deux amans (A. Bossuat, "Un ordre de chevalerie auvergnat : l'ordre de la Pomme d'or", p. 11 ; C. Bozzolo et H. Loyau, La cour amoureuse dite de Charles VI, I, p. 140 ; A. Demurger, "Guerre civile et changements du personnel administratif", p. 255 ; Cte de Remacle, "Les l'Hermite de La Faye", p. 191-196).
Édition : Olivier Mattéoni .
Consulter la bibliographie — Afficher le XML source de l'acte — Afficher la version pdf de l'acte.