1397, 11 juin. — Riom.
Jean, fils de roi de France, duc de Berry et d'Auvergne etc., et Louis, duc de Bourbonnais etc., désignent de nouveaux commissaires, parmi lesquels se trouvent, du côté bourbonnais, Denis de Beaumont, bailli de Forez, et maîtres Jean Marchand et Gilbert Graulier, pour enquêter sur la question de leurs droits respectifs aux frontières de l'Auvergne, du Bourbonnais, du comté de Montpensier et aussi de la châtellenie de Thiers, la première commission mise sur pied quelques années auparavant n'ayant pu aboutir.
A. Original sur parchemin, signé, jadis scellé de deux sceaux sur double queue aujourd'hui disparus. 410 x 335 mm, repli 45 mm. Mention dorsale : "Commission de nos seigneurs de Berry et de Bourbonnois, donnee en juing l'an IIIIXX XVII". Ancienne cotation VIIIXX IX. Paris, Archives nationales, P 1372/1, n°2048.
Analyse : Titres de Bourbon, II, n°4110, p. 88.
Jehan, filz de roy de France, duc de Berry et d'Auvergne, comte de Poitou, de Bouloigne et d'Auvergne, et Loÿs, duc de Bourbonnois, comte de Clermont et de Forests, per et chamberier de France, seigneur de Combraille et de Chasteauchinon, a noz amez et feaulx Ponchon de Langhac, seneschal d'Auvergne, maistres Jehan Gouge, Hugues la Roiche et Jehan Boyer, conseilliers de nous, duc de Berry, et commis de par nous en ceste partie, et a Denys de Beaumont, baillif de Forests1, maistres Jehan Marchant2, Gillebert Graulier3 et le juge de Forez4, conseilliers de nous, duc de Bourbonnois, et commis de par nous en ceste partie, salut. Comme plusieurs debaz soient ja pieça meuz et esperez a mouvoir entre nous et noz gens et officiers pour nous, tant es marches d'Auvergne, de la conté de Montpencier et de Bourbonnois comme de Forez, et aussi en la chastellenie de Thiart, de et sur plusieurs droiz et choses que chascun de nous contre l'autre dit et maintient a lui appartenir, tant a cause de demaine, fiefs et re fiefs comme de ressort, souveraineté et autrement, et sur ce eussions ja pieça traittié et accordé que certains commissaires des lors nommez pour chascun de nous descendroient sur les lieux pour savoir et enquerir la verité du droit de chascune partie, et tout ce que fait et trouvé en auroient ilz rapporteroient feablement encloz soubz leurs seaulx par devers nous ou noz conseilz dedens certain temps passé, pour en ordonner si comme de faire feroit, et ce pendant que laps de temps ne pourroit courir sur ce contre aucun de nous ; et il soit ainsi que lesdis commissaires occuppez de plusieurs autres besoingnes n'ont peu vaquer es choses dessus dictes, et aussi que depuis aucuns d'eulx sont alez de vie a trespassement. Pour ce est il que nous, desirans d'un costé et d'autre nourrir bonne paix, amour et concorde entre nous ainsi qu'elle y est et doit estre, et affin d'eschever toute matiere de plait et discorde, voulans que sur yceulx debaz la verité soit amiablement sceue affin que chascun de nous puisse avoir raisonnablement son droit, avons derechief traictié, volu, ordonné et accordé, voulons, ordonnons et accordons entre nous par la teneur de ces presentes pour ce doublees de nostre consentement que noz procureurs pour nous bailleront par declaracion en escript par devers vous huit ou les dix de vous, c'est assavoir trois de chascune partie, touz lesdis debaz, tant anciens comme nouveaulx, et que par vous, en descendant sur les lieux, soit sceue et enquise la verité du droit de chascun de nous. Et ce que fait et trouvé en aurez, rapportez par devers nous ou noz conseilz pour en ordenner ainsi qu'il appartiendra dedens un an a compter de la date de ces presentes, et que laps de temps ne courra contre l'une partie ne contre l'autre depuis la date des premieres lettres qui sur ce furent donnees par un chascun de nous jusques au terme dessus dit et a venir. Et avec ce que touz penonceaulx, brandons, mains mises et autres exploiz et menouvremens de justice faiz d'un costé et d'autre depuis la date desdictes premieres lettres jusques a present sont mis au neant et de nulle valeur et reputez comme non faiz et non avenus, et seront levez et ostez. Et ou cas que par ceste voie amiable nous ne pourrions estre d'accord, nous consentons et accordons que chascune partie se pourra pourveoir par voie de justice, tant en proprieté comme en possession, tout ainsi et par la maniere qu'elle feist et peust faire au temps de la date desdictes premieres lettres. Si mandons et commectons a vous tous ensemble ou aus six, troys ou deux de vous, c'est assavoir troys de chascun cousté ou deux en l'absence des troys, que vous dessandez sur lesdiz lieux contentieux et appelez nozdiz procureurs et ceulx qui feront a appeler, enquerez bien et diligemment la verité des choses dessus dictes. Et tout ce que fait et trouvé en aurez, rapportez ou envoyez par escript feablement encloz soubz voz seaulx dedens ledit temps par devers nous ou noz conseilz pour en ordenner et determiner, si comme nous ou noz conseilz verrons que de fere sera. De ce fere nous donnons pouvoir, auctorité et mandement especial a vous huyt, c'est assavoir aux quatre ou troys d'une chascune partie ou deux en l'absence des troys comme dit est, mandons et commandons a touz noz justiciers, officiers et subgiz, requerons touz autres que en ce faisant vous obeïssent et entendent diligemment. En tesmoing de ce, nous avons fait mectre noz seaulx a ces presentes. Donné a Riom, le XIme jour de juing, l'an de grace mil CCC quatre vins dix et sept.
(Sur le repli, à gauche :) Par monseigneur le duc de Berry, a la relacion de son conseil ouquel vous, monseigneur le conte de Sancerre, monseigneur de Gyac5 et plusieurs autres estiez.
(Signé :) Ponte.
(Sur le repli, à droite :) Par monseigneur le duc de Bourbonnois, a la relacion de son conseil ouquel estoient monseigneur de Norry6, messire Robert de Chalus7, et plusieurs autres.
(Signé :) Arnier.
1. Denis de Beaumont a été nommé bailli de Forez le 24 mars 1379 (Paris, Bibliothèque nationale de France, lat. 10034, fol. 86). Sa dernière mention dans l'office est le 14 avril 1407 (Archives départementales Loire, B 2003, fol. 123). Il a supervisé la "visitation" faite au comté de Forez en 1384-1385 (Archives départementales Loire, B 1913, fol. 3v-5 ; É. Fournial, "Enquêteurs, réformateurs et visiteurs généraux", p. 30-33 ; O. Mattéoni, "Louis II de Bourbon, l'enquête et la réforme", p. 174).
2. Jean Marchant est conseiller de la Chambre des comptes de Moulins depuis 1394, et il l'est encore en mai 1411 (Paris, Archives nationales, P 1360/2, n°845 ; éd. O. Mattéoni, "Les Chambres des comptes de Moulins, Montbrison et Villefranche-en-Beaujolais", p. 86-88). En tant que conseiller des comptes, il participe à plusieurs reprises à la vérification des comptes des officiers de Forez à Montbrison (Archives départementales Loire, B 1917, fol. 22v ; B 1932, fol. 12v). Le 17 décembre 1394, il est désigné lieutnenat général du bailli de Bourbonnais (Paris, Archives nationales, P 1374/2, n°2429). Il est sollicité par Louis II pour régler le différend qui l'oppose à l'archevêque de Bourges au sujet des hommes de plusieurs localités de la châtellenie de Chantelle que l'archevêque revendiquait comme ses hommes en raison de son château de Naves en 1394 et dans les années qui suivent (Paris, Archives nationales, P 1356/2, n°280 ; P 1360/2, n°837). Il est désigné avec l'Hermite de La Faye, le maréchal de Bourbonnais et Jean Gaiget pour prendre possession de la ville et châtellenie de Château-Chinon que Charles VI a octroyée à Louis II en échange des terres de la succession de Mahaut de Saint-Pol (Paris, Archives nationales, P 1357/1, n°341). Il termine sa carrière comme garde des sceaux aux contrats du duché de Bourbon (attesté en 1416 et 1420 : Archives départementales Allier, 1 G 28 ; H 772).
3. Originaire de Gannat, Gilbert Graulier est garde des sceaux aux contrats du duché de Bourbonnais (cité le 15 septembre 1392 : Paris, Archives nationales, P 1357/1, n°359) et conseiller du duc (Moulins, Archives municipales, n°247, fol. 21, mai 1406). Il est avocat du duché de Bourbonnais dans les années 1390. Il termine sa carrière comme châtelain de Gannat (jusqu'au 25 février 1442, date à laquelle il est forcé de céder la place en raison de "sa decrepitude et impatience" : Paris, Bibliothèque nationale de France, fr. 22299, p. 11).
4. Licencié en lois, chanoine de Chartres, Pierre Vernin est juge de Forez du 26 mars 1380 au 15 fevrier 1411 (Paris, Bibliothèque nationale de France, lat. 10034, fol. 87 ; Archives départementales Loire, B 1944, fol. 13v).
5. Pierre de Giac a été chancelier de Louis II de Bourbon de 1358 à 1371 (Paris, Archives nationales, P 1358/2, n°546, P 1359/2, n°744). Il est cité conseiller du duc durant cette période (O. Mattéoni, "Écriture et pouvoir princier", p. 147). Possessionné en Auvergne, licencié en lois, il a d'abord été maître des requêtes de Jean de France, avant de revenir à son service comme chancelier à partir de 1371. Il reste chancelier du duc de Berry jusqu'en 1383, date à laquelle il est nommé chancelier de France (R. Lacour, Le gouvernement de l'apanage de Jean, duc de Berry, p. 162 et XIV [annexes]).
6. Originaire du Nivernais, Pierre de Nourry est l'un des principaux conseillers de Louis II. Il est attesté comme conseiller du début de 1360 à 1410. Il occupe la charge de lieutenant général à plusieurs reprises à partir des années 1370 jusqu'à la fin du principat du duc en 1410 (A. Leguai, De la seigneurie à l'État. Le Bourbonnais pendant la guerre de Cent Ans, p. 283-291 ; O. Mattéoni, "Entre fidélité et compétence. Les conseillers du duc Louis II de Bourbon", p. 180 et 183 et suiv.). Il fait l'objet d'un jugement élogieux dans la Chronique du bon duc Louis de Bourbon par Cabaret d'Orville qui vante ses qualités de gestionnaire et de réformateur des finances ducales (Chronique du bon duc, p. 160-164, 275-280). Il était membre de la Cour amoureuse fondée en 1401 par Louis II et le duc de Bourgogne Philippe le Hardi (C. Bozzolo et H. Loyau, La cour amoureuse dite de Charles VI, I, n°201, p. 139).
7. Robert de Chalus, homme de guerre, membre de l'Hôtel de Louis II, a participé à la croisade de Prusse en 1375-1376 et a pris part à plusieurs expéditions militaires (prise de Vertueil en 1380, expédition de Flandre en 1382, défense des territoires beaujolais contre les les attaques d'Amé de Viry en 1409 : La chronique du bon duc Loÿs de Bourbon, p. 144, 169, 295-296). Il a contribué à la défense du comté de Forez en 1388 (Archives départementales Loire, B 1915, fol. 14v ; É. Fournial et J.-P. Gutton, Documents sur les trois états du pays et comté de Forez, n°12, p. 98). Signalé comme chambellan du roi en 1404, il est sénéchal de Carcassonne de 1403 à 1414 (A. Demurger, "Guerre civile et changement du personnel administratif", p. 241-242).
Édition : Olivier Mattéoni .
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