1376 (n. st.), 24 janvier. — Montluçon.

Louis, duc de Bourbonnais etc., abandonne à titre de douaire à Agnès Challeu, veuve de feu Jean, bâtard de Bourbon, pour sa vie durant, les château et châtellenie de Rochefort, la châtellenie et justice de Jenzat, la terre et justice de Servant, divers héritages ayant jadis appartenus à Thomas Arnoux, de même qu'un droit de chauffage et de pacage dans la forêt de Bellenave et tous les meubles, joyaux et vaisselle que le bâtard de Bourbon possédait au jour de sa mort.


A. Original perdu.

B. Copie collationnée sur papier, signée Jehan Barrel, "clerc juré de la chancellerie de Gannat", non datée. Paris, Archives nationales, P 1356/2, n°270.

Analyse : Titres de Bourbon, I, n°3322, p. 583.

Indiqué : P. Tiersonnier, Rochefort, châtellenie bourbonnaise, p. 323.


Loÿs, duc de Bourbonnois, conte de Clermont et de Fouroys, per et chamberier de France. Savoir faisons a tous presens et avenir que comme ou contrau du mariage de feu nostre amé et feal chevalier et conseilher messire Jehan bastart de Bourbon1 et de dame Agnes Challee, feua sa fame, entre les autres chouses fust parlé et acordé que ledit feu messire Jehan voult et acorda que ou cas qu'il y yroit de vie a trespassement avant la dicte dame Agnes emprés la celebracion du mariage, que la dicte dame Agnes fut dohee du chastel de Rocheffort2, de la moyté de la terre et justice et autres droiz appartenans oudit chastel et chastellenie, de la moyté de la terre et justice et autres droiz de Bellanave3, de la moyté de la terre et justice de Bruille, et de la moyté de toutes autres rantes et possessions que ledit messire Jehan tenoit et possedoit ou jour du contrau dudit mariage, lequel dohere nous avions lor ratifié, voulu et acordé et par noz lettres seelleez de nostre seel en las de soye et cire vert, et ladicte dame Agnes nous heut requis et fet requerir que sondit dohere nous pleut a li delivrer et ballez et d'icelli fere joïr et user par la maniere qu'il est contenu es lettres du contrau dudit mariage et lettres de confirmation a elle octroyees sur ce. Item que comme constant le mariage dudit messire Jehan et de ladicte dame Agnes, ledit messire Jehan ait fet plusieurs aqués de rantes, terres et possessions mesmement du chastel et chastellenie de Beçay4 que il a acquis de nostre tres chiere et tres amee tante la contesse de Fouroys par titre de donaciom qui ou dit feu messire Jehan les donna et transporta pour agreables services et en acroissement de son bien. Item de la terre de Servant que il a aquise de feu Guillaume de Mequeux par titre de donaciom et qui nagueres est obvenue par la mort du dit Guillaume de Merqueux. Item les chouses contenues en la donaciom que jadis fut faicte ou dit messire Jehan par Jehan de la Mote Jolivet, escuier. Item le disme apellé de la Dure assis prés de Tizon5 que le dit messire Jehan aquist par titre d'achapt. Item les vignes et autres heritages qui furent Thomas Arnoux, nostre homme sert, que le dit messire Jehan aquist de noz jours par crie de ville et qui a lui furent vandues et estrosseez comme ou plus ouffrant et darrier encherissant. Item un hostel en nostre ville de Molins, lequel le dit messite Jehan aquist de nous par titre de donaciom, lequel hostel est assis pres de nostre chastel de Molins et fut de feu Pouleguart. Et comme constant le mariage entre le dit messire Jehan d'une part, et la dicte dame Agnes sa fame d'autre part, par la vraye et loyal amour que l'uns avoit a l'autre, heut esté faicte et acordee une donaciom mutuele : c'est assavoir que pour icelle, eux et chascun d'eux voult et acorda, donna et octroya au survivant d'iceux touz les meubles et conquez que il tendroit et possedroit le jour de son decest si comme il nous est apparu par les lettres de la dicte donaciom sur ce faictes. Si disoit et mantenoit la dicte dame Agnes que, pour vertu de la dicte donaciom mutuele, tres tous lesdiz conquest et autres si aucuns estoient et tous les meubles que ledit messire Jehan avoit et possidoit le jour de son decest estoient siens et a elle appartenoient. Et nous a requis et molt humblement supplié que il nous pleut desdiz conquez et meubles la fere user et joïr pasiblement par la maniere et forme contenues es lettres de ladicte donaciom, et disoit et mantenoit que ainsi le devions nous fere, vehu la teneur des dictes lettres, nous, avecques les gens de nostre grant conseil, vehues et regardees les lettres du contrau dudit mariage, la confirmaciom a elle faicte de son dit dohere de nous, les lettres de la donaciom mutuele et toutes les autres chouses que ladicte dame Agnes nous a exibités et monstrees, touz vehuz et regardés, et considerés les debbas qui ont esté sur ce d'une partie et d'autre, n'a pas samblé a nous ne a nostre conseil que, consideré l'estat de la personne dudit messire Jehan, que es diz conqués fetz par le dit messire Jehan par la maniere dessus dicte, la dicte dame Agnes pehut reclamez aucun droit par plusieurs causes et raisons dictes et declarees par plusieurs sages estans en nostre grant conseil. En la parfin la dicte dame Agnes, de son bon gré et pure volunté, par le conseilh de plusieurs ses amis a ce presens, de toutes les chouses dessus dictes et de tout ce que elle en povoit demander a presant et par le temps avenir, et de tout ce que li povoit ppartenirb par cause de son dohere et des diz conqués et meubles, elle se est du tout en tout submise a nostre bonne ordenance et volunté. Pourquoy nous, vehu et regardé le bon port de la dicte dame Agnes et les bons et agreables services que elle a faiz a son dit fu mari et de ce que elle se est mise a nostre ordonnance et volunté, non obstant que a nous et a nostre conseil ne samble point que a tant nous soyons tenuz, de certaine science et grace especial avons ballé, assis et assigné a la dicte dame Agnes, tant par cause de son dit dehere comme pour touz les autres droiz que elle povoit avoir ne reclamer en toutes les chouses dessus dictes, a tenir et possider le cours de sa vie tant seulement les chouses qui s'ensuyvent : c'est assavoir le chastel et chastellenie de Roucheffort aveques lez molins, columbier dessoubz le dit chastel, justice, cens, rantes et autres drois appartenans ou dit chastel, la chastellenie, justice et appartenances de Genzat, tout ainsi comme elle fu au dit messire Jehan, une autre fois assignee par feu messire Pierre Galabrun, lors nostre bailli de Bourbonnois6, et Symon Bertine, lors nostre clec de Bourbonnois7, et que il la tenoit et possidoit le jour de son obiit, sauve et excepté trante libvres de rante qui li furent assigneez sur nostre layde de Charrouz8 qui a nous demoroit. Item li avons oultre baillé la terre et justice de Servant obvenue et escheue par titre de donaciom par la mort du dit feu Guillaume de Merqueux. Item le dit disme appellé de la Dure et les vignes et autres heritages qui furent Thomas Arnoux, nostre homme sert, acquises comme dit est. Item l'usage a chaussez et bastir en noz boix et forest de Bellanave es uns et proffis de l'ostel de Rocheffort et des appartenances, et le pasquage de vint pors es diz boix et forest chescun an la vie de la dicte dame durant un tel que encommence emprés la mort de la dicte dame toutes les dictes chouses seront, demorront et reviendront a nous et a noz hoirs et successeurs perpetuelment, et toutes les autres terres que le dit feu messire Jehan tenoit et possidoit par quelconque cause et titre le jour de son decest sont et demeurent a nous et a nous hoirs et successeurs. Item avons donné et donnons par ces lettres par consideraciom des chouses dessus dictes a la dicte dame Agnes et a ses hoirs touz les meubles, joyaux, vaysele et autres meubles quelconques que le dit feu messire Jehan et la dicte dame Agnes avoyent et possedoient le jour du decest du dit messire Jehan, et que la dicte dame Agnes a et posside a present es chasteaux et chastellenies de Rocheffort et de Genzat9 et es autres terres que nous li avons balleez et assignees en dohere par la maniere dessus dicte. Item tous ceux que elle a en ses mesons et terres movans de son costé, et touz les autres meubles et debtes qui sont et sont dehuz es autres terres qui de presens nous demeurent sont nostres et a nous demeurent sauve et excepté tout ce que la dicte dame Agnes en a pris ou fet prandre depuis la mort du dit feu messire Jehan jucques aujourduy, et des debtes fetz par le dit messire Jehan que il devoit ou jour de son decest et desquieux les parties nous ont esté balleez par devers nous segneez de la main des gens de la chambre de noz comptes, dont la dicte dame Agnes a la copie samblablement segnee, nous somes tenuz de paier et acquiter la dicte dame Agnes et ses hoirs et successeurs envers les personnes qui s'ansuivent des sommes qui s'ansuivent : c'est assavoir envres les hoirs de feu Humbert Saunier, de huit cens franz, envers Jehan Broyart, de deux cens deux frans, envers Jehan d'Antregues, tresorier de Bourbonnois10, de cent franz, envers Estienne d'Antraigues, tresorier de Fouroys11, de cent frans, envres Macé de Forges, de cinquante ung frant, et touz les autres debtes contenuz ou dit rolle la dicte dame Agnes sera tenu de paier a eux a qui il sont dehus par raison. Et si aucuns autres debtes estoient hors du dit rolle que veritablement fussent dehus clers et cogneuz que les diz creanciers porront dehuement monstrer a nous et a noz gens et desquieux nous prandrons la deffense emprés ce que il seront atains et clerement monstrés, nous seront tenuz de paier la moyté et la dicte dame l'autre moyté. Et nous prometons en bonne foy garentir et deffendre envers et contre touz a la dicte dame Agnes le cours de sa vie durant tant seulement les chouses dessus distes a elle par nous ballees en dohere par les causes et raisons dessus dictes. Et si aucuns empeschemens li estoit mis pourquoy elle ne pehut joïr des dictes chouses ou de aucune d'icelles, nous serons tenuz de li randre la valeur des chouses empeschees pendant le dit debbat chescun an. Et la dicte dame Agnes et ses hoirs et successeurs acquiteront envers ceux a qui il appartiendra des debtes dessus diz que nous avons receu a nous et desquieux nous somes tenuz de la acquiter par la maniere dessus dicte. Et les chouses dessus dictes et chescune d'icelles nous prometons en bonne foy tenir, garder et actendre sans les enfraindre ne venir encontre en aucune maniere, et quant a icelles tenir et actendre, nous oblighons nous et noz biens, noz hoirs et successeurs et ceux qui de nous auront ne porront avoir causes et touz leurs biens presens et avenir. Et en tesmoing des chouses dessus dictes et affin que ce soit chouse ferme et estable, nous avons fet seyler ces presentes lettres de nostre seel, lesquelles furent faictes et donneez en nostre ville de Montluçon, ou moys de janvier, l'an mil trois cens sexante et quinze, XXIIIIe jour du dit moys de janvier.

Par monseigneur le duc en son conseil ouquel estoient monseigneur de la Claiete12, monseigneur de Norry13, les gens de sa chambre des comptes et le bailli de Bourbonnois14.

(Signé :) P. Desmer.


1. Jean bâtard de Bourbon est le fils naturel de Louis Ier de Bourbon. Au temps de Louis II, entre 1365 et 1374, il a exercé à de nombreuses reprises la charge de gouverneur et de lieutenant général, ou de lieutenant du comté de Forez (Paris, Archives nationales, P 1355/1, n°12, P 1358/2, n°582, et Bibliothèque nationale de France, lat. 10034, fol. 66v, 73v, 75). Seigneur de Rochefort en Bourbonnais (P. Tiersonnier, Rochefort, châtellenie bourbonnaise, p. 304-326), il se maria en troisièmes noces avec Agnès de Chalheu (P. Van Kerrebrouck, La maison de Bourbon, p. 54). Il fut un important conseiller de Louis II entre 1361 et 1374, année de sa mort (O. Mattéoni, "Entre fidélité et compétence", p. 181 et suiv.).

2. Rochefort : Allier, ar. Vichy, communauté de com. Saint-Pourçain Sioule Limagne, com. Saint-Bonnet-de-Rochefort.

3. Bellenaves : Allier, ar. Vichy, c. Gannat.

4. Bessay-sur-Allier : Allier, ar. et c. Moulins.

5. Tizon : Allier, ar. et c. Montluçon, com. Saint-Victor.

6. Pierre Galebrun a été clerc de Pierre Ier en 1343, 1345 et 1350 (Paris, Archives nationales, P 1376/2, n°2709, et P 1394/1, n°34), et son conseiller en 1345 (Ibid., P 1373/2, n°2227). Il a ensuite été bailli de Bourbonnais au milieu des années 1350 (Ibid., P 1374/2, n°2401).

7. Membre d'une famille moulinoise, il a été clerc de Bourbonnais dans les années 1360 (Paris, Archives nationales, P 1356/2, n°270, et P 1374/1, n°2383). Son fils Jean sera garde des sceaux aux contrats de la chancellerie de Bourbonnais et conseiller de la Chambre des comptes de Moulins dans les années 1390 – il est attesté en 1394 et en 1399 (Archives départementales Loire, B 1917, fol. 22v, et B 1930, fol. 13v).

8. Charroux : Allier, ar. Moulins, c. Gannat.

9. Aujourd'hui Jenzat : Allier, ar. Vichy, c. Gannat.

10. Originaire de Souvigny, frère d'Étienne d'Entraigues, Jean d'Entraigues a débuté sa carrière dans les offices de finance comme trésorier de Forez en 1369 (nommé le 18 mai : Paris, Bibliothèque nationale de France, fol. XXXVIv ; É. Perroy, "Le personnel administratif", p. 154. É. Fournial, Les mémoriaux de la Chambre des comptes de Forez, p. 75 et 79-80). Il est remplacé par son frère Étienne le 9 juin 1370 (Paris, Bibliothèque nationale de France, fol. 69). Il devient trésorier de Bourbonnais après son départ du Forez. Le présent acte est la seule mention qui le mentionne dans cet office. Il est par ailleurs secrétaire ducal : il signe un acte en 1361 (Paris, Archives nationales, P 1376/2, n°2705) et un en 1383 (Paris, Bibliothèque nationale de France, lat. 10034, fol. 96v).

11. Frère de Jean d'Entraigues, Étienne d'Entraigues est nommé trésorier de Forez le 9 juin 1370. Il le demeure jusqu'au 22 janvier 1409, date à laquelle il est remplacé par Guillaudon Chauvet (Paris, Bibliothèque nationale de France, lat. 10034, fol. 69 ; Archives départementales de la Loire, B 1950, fol. 50 ; É. Perroy, "Le personnel administratif", p. 154. É. Fournial, Les mémoriaux de la Chambre des comptes de Forez, p. 75 et 79-80). Il est alors institué président de la Chambre des comptes de Montbrison, office que Louis II crée spécialement à son intention. Il est attesté pour la première fois dans cette nouvelle charge le 9 juillet 1409 (Archives départementales Loire, B 1958, fol. 50 ; É. Fournial, Les mémoriaux de la Chambre des comptes de Forez, p. 90).

12. Il s'agit de Philibert de l'Espinasse. Seigneur de la Clayette, celui-ci est attesté comme conseiller de Louis II d'une manière presque continue de 1366 à 1389 (O. Mattéoni, "Entre fidélité et compétence", p. 182 et 190). Conseiller du comte de Poitiers avant d'être désigné gouverneur d'Auvergne (F. Lehoux, Jean de France, duc de Berri, p. 180), il passe ensuite au service de Louis II de Bourbon. Il joue un rôle dans la prise de possession du comté de Forez durant l'été 1368 (O. Mattéoni, Servir le prince, p. 77, et Paris, Bibliothèque nationale de France, lat. 10034, fol. 64v-65). Conseiller aussi de Charles V, et proche de Pierre de Nourry, fidèle conseiller de Louis II, il favorise le mariage de la fille de ce dernier avec son propre filleul, Philibert, dit Cormorant, seigneur de Changy (É. Perroy, Les familles nobles, I, p. 329).

13. Originaire du Nivernais, Pierre de Nourry est l'un des principaux conseillers de Louis II. Il est attesté comme conseiller du début de 1360 à 1410. Il occupe la charge de lieutenant général à plusieurs reprises à partir des années 1370 jusqu'à la fin du principat du duc en 1410 (A. Leguai, De la seigneurie à l'État. Le Bourbonnais pendant la guerre de Cent Ans, p. 283-291 ; O. Mattéoni, "Entre fidélité et compétence. Les conseillers du duc Louis II de Bourbon", p. 180 et 183 et suiv.). Il fait l'objet d'un jugement élogieux dans la Chronique du bon duc Louis de Bourbon par Cabaret d'Orville qui vante ses qualités de gestionnaire et de réformateur des finances ducales (Chronique du bon duc, p. 160-164, 275-280). Il était membre de la Cour amoureuse (C. Bozzolo et H. Loyau, La cour amoureuse dite de Charles VI, I, n°201, p. 139).

14. À cette date le bailli de Bourbonnais est Jean Griveau. Ancien conseiller de Pierre Ier de Bourbon puis de Louis II, Jean Griveau a d'abord été trésorier de Bourbonnais en 1347-1348 (Paris, Archives nationales, P 1355/2, n°91 et P 1358/1, n°515). On le trouve ensuite bailli de Bourbonnais de 1361 au moins à 1365 au moins (Paris, Archives nationales, P 1355/1, n°14, P 1358/2, n°582), après avoir été sénéchal de la Marche (Ibid., P 1363/2, n°1200). Il le redevient dans les années 1370 (attesté dès 1372 : Montluçon, Archives municipales, FF23).

  1. sic.

  2. sic pour appartenir.

Édition : Olivier Mattéoni .

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