1443 (n. st.), 31 mars. — Toulouse.
René, roi de Jérusalem et de Sicile, duc d'Anjou, etc., cède à Prigent de Coëtivy1, amiral de France et époux de Marie, fille de feu Gilles de Rais, tous ses droits sur les terres de Champtocé2 et d'Ingrandes3, confisquées par le procureur général d'Anjou au sire de Rais, coupable de crimes, commis avec le consentement de feu Jean de Craon4 et de son frère René de La Suze5, et, en dépit de cette procédure, vendues au duc de Bretagne, causant un procès en Parlement.
A. Original non retrouvé, signé par le secrétaire Guilelmus Bernardi et scellé du grand sceau.
B. Copie dans le cartulaire des sires de Rais, du chartrier de Thouars, datée du xve siècle. Paris, Archives nationales, 1AP/1994, folio 82 recto-83 verso, no75.
C. Copie du xve siècle. Nantes, Archives départementales Loire-Atlantique, E 220, no10 [copie numérisée].
a. Blanchard (René), Cartulaire des sires de Rays (1160-1449), 1, Poitiers, Société française d'imprimerie et de librairie, 1898, p. 203-207, nolxxv [ouvrage numérisé].
René, par la grace de Dieu roy de Jherusalem et de Cecille, duc d'Anjou, de Bar et de Lorranne, marquis du Pont, conte de Provence, de Forcalquier et de Pimon, a tous ceulx qui cez presentes lettres verront, salut.
Comme ja pieca, a l'occasion de ce que feu nostre cousin Gilles, ser de Rays, ou temps qu'il vivoit mareschal de France, avoit commis et perpetré en nostre duché et seigneurie d'Anjou pluseurs crimes et delitz, tant a l'encontre de nous que d'autres, et aussi fait pluseurs entreprinses contre nous, prins places a nous appartenantes, contre nostre gré et volunté, et de feue nostre dame et mere la royne de Cecille, que Dieu absoille, aïant le gouvernement de nostre duché d'Anjou pour nous en nostre absence, et autrement commis et perpetré pluseurs crimes et delitz, tant a l'encontre de nous et de nostre seigneurie, comme d'autres, desquelz feu Jehan de Craon che avoit esté consentent, et aussi avoit René de Rays, ser de la Suze,
et, a ceste occasion, nostre procureur general en nostredit duché eust fait prandre, saesir et mectre en nostre main les terres, chasteaux et chastellenies de Champtocé, Ingrande, et toutes les autres terres et seigneuries apartenantes audit de Craon et a nostredit cousin, et a son frere, tenues et mouvans de nous a cause de nostredit duché d'Anjou, avecques les fruiz et revenues d'icelles,
et, a la requeste de nostredit procureur, iceulx de Craon, sire de Rays et sondit frere, eussent esté adjournez et mis en procés en nostre court d'Angers pour lui respondre, aux fins et conclusions qu'il voudroit tandre et eslire a l'encontre d'eulx et de chascun d'eulx sur lesdit cas et crimes, et sur l'infraccion de nostredit main mise, en laquelle nostre court a esté par aucun temps procedé en ladite cause ou causes, et telement qu'il a esté declairé lesdites terres a nous apartenir, ou au moins que ledit sire de Rays a esté condampné en grosses amandes et peines envers nous, ou que soit sont lesdites declaracions, admandes et peines encores a declairer, lesquelles nous sont deues par nostre cousine Marie de Rays, fille et heritiere dudit de Rays,
et, au regart dudit de la Suze, n'y a depuis esté procedé,
et, depuis, ledit sire de Rays, nonobstant nostredite main mise, a vandu ou transporté lesdites terres, ou au moins celle de Champtocé, a feu nostre cousin le duc de Bretaigne, lequel en a prins ledit transport iasoit ce qu'il nous eust promis de non contracter avec ledit sire de Rays desdites terres de Champocé et Ingrande, ne d'autres terres que ledit sire de Rays eust en nostredit duché et seigneurie, et, a ceste occasion et autres, aïons mis en procés nostredit feu cousin le duc de Bretaigne en la court du parlement de monseigneur le roy a Paris, et fait a l'encontre de lui nos demandes et conclusions, et, parties oyes par ladite court, ayt esté donné certain arest a nostre proufit, depuis lequel arest prononcé, nostredit cousin le duc de Bretaigne est alé de vie a trespassement, a lui survivant nostre tres cher et tres amé frere et cousin, le duc de Bretaigne qui a present est, son filz, et autres ses enffans,
et nostre amé et feal chevalier, conseiller et chambellam, Prigent de Coectivy, admiral de France, a esté conjoint par mariaige avecques nostred cousine de Rays.
Savoir faisons que nous, aïans a memoire les bons, grans, loyaulx, agreables et recommandables services et plaisirs que ledit de Coectivy, admiral de France, et ses parens et amis, nous ont fait le temps passé, et a noz predecesseurs, en pluseurs et maintes manieres, font chascun jour et esperons que plus facent ou temps ad venir, a icellui de Coectivy, avons donné, cedé, transporté et delaissé, et par cez presentes donnons, cedons, transportons et delaissons lesdites admandes, peines et confiscacions, commisses ou commissions de fié ou fiefz, multes et tous autres interestz, droiz et accions, poursuites, demandes, querelles que avons et povons avoir, et qui nous competent ou pevent competer et apartenir, en quelconque maniere que ce soit, ou peut estre, tant a l'encontre dudit feu Gilles et de ses heritiers et successeurs, et de René de Rays, frere dudit Gilles, et leurs biens, terres et seigneuries, soit a l'occasion de feu Jehan de Craon, chevalier, leur ayeul, ou autrement, comme a l'encontre de nostredit cousin le duc de Bretaigne, ou autre detenteur desdites places, chastellenies, terres et seigneuries de Champtocé et Ingrande, en quelque maniere que ce soit ou peut estre, pour en joïr par ledit de Coectivy, ses hoirs, successeurs et aïans cause, et pour en faire perpetuelment et paisiblement leur planiere et delivre volunté a vie et a mort, sans nul contredit, et sans ce que nous, ne noz heritiers, successeurs et aïans cause, a l'occasion de ladite poursuite faicte ou a faire, ne dudit arest, ne autres que pourions obtenir a l'encontre de nostredit cousin, dudit René de Rays, ou autres detenteurs desdites places, terres et seigneuries apartenans ausdiz de Craon, Gilles et René de Rays, peussons riens y querré ne demander, en quelque maniere que ce soit ou puisse estre, ne que a l'occasion desdiz crimes, delitz confiscacions, commissions, peines, multes, amandes, main mise ou accions, nous en puissons faire accion, question, peticion ou demande audit de Coectivi, ses heritiers, successeurs et ayans cause, ne a nostredite cousine, ne autres quelzconques, en imposant sur ce silence perpetuel a nostredit procureur, et a tous nos autres officiers.
Si donnons en mandement par cesdites presentes a noz amez et feaulx conseillers les juge, gens de noz comptes, tresorier et receveur d'Anjou, et a tous noz autres justiciers et officiers, ou a leurs lieuxtenans, et a chascun d'eulx, si comme a lui appartient, que, ledit de Coectivy, ses heritiers, successeurs et aïans cause, de noz presens grace, don, cession, transport et octroy, ilz facent, seuffrent et laissent joïr et user plainement et paisiblement, sans lui mectre ou donner, ne souffrir estre mis ou donné, ores ou pour le temps ad venir, ne aux siens, ne ceulx qui de lui auront cause, aucun arest, destourbier ou empeschement au contraire, et, si pour occasion desdiz crimes, delitz, confiscacions, commissions, amandes, peines, multes, transport et arest, main mise dessusdite ou autrement, lesdiz chastel et chastellenies de Champtocé et de Ingrande, ou les autres terres et seigneuries qui furent dudit feu Jehan de Craon et dud Gilles de Rays, ou qui sont dudit René, ou aucunes de leurs appartenances et deppendences, et les fruiz, revenues et esmolumens d'iceulx, estoient prins, arestez ou mis en la main de monseigneur le roy ou en la nostre, a la requeste de nostredit procureur, ainsi que dit est, ou autrement, facent houster et lever lesdites main mises, et chascune d'icelles, tantost et sans delay, au prouffit dudit de Coectivy, ses heritiers, successeurs et aïans cause, et lui mectre a plaine delivrance, et laquelle nostre main mise, des le present, nous en avons levee et hostee, levons et hostons, et consentons que ladite main de mondit seigneur le roy en soit levee et ostee, au prouffit dudit de Coectivi, ses heritiers, successeurs et aïans cause, par cez presentes, non obstant quelconques ordonnances par nous faictes ou a faire de non alienner aucune chose de nostre demaine, et de revocacions desdites aliennacions, et lettres de mandemens, ordonnances ou deffences a ce contraires, et, par raportant cez presentes, ou vidimus d'icelles fait soubz l'un de noz seaulx, nous voulons lesdites declaracions, confiscacions, commissions, amandes, main mise, multes et peines, estre rabatues de la recepte de celui ou ceulx qui les devroient recevoir, et en randre compte par noz amez et feaulx gens de noz comptes et autres qu'il apartiendra, ausquelx nous mandons que ainsi le facent, sans aucun contredit ou difficulté.
En tesmoign de ce, nous avons fait mectre nostre grant seel a cez presentes.
Donné a Tholose, le derrenier jour de mars, l'an mil cccc quarante et deux avant Pasques.
Par le roy, le seigneur de Beauveau, gouverneur des pays de Bar et de Lorrane, et le seigneur de Precingné, grant maistre d'ostel, presensa.
(Signé :) G. Bernardi.
1. Coëtivy, com. Bourg-Blanc, Finistère.
2. Champtocé-sur-Loire, Maine-et-Loire.
3. Ingrandes, Maine-et-Loire.
4. Craon, Mayenne.
5. La Suze-sur-Sarthe, Sarthe.
La copie de la mention hors teneur est précédée de la mention ainsi signé.
Édition : Jean-Damien Généro .
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